OASIS
Quand la guerre fait rage entre les hommes, quand leur langue est trempée dans le sang, il faut savoir gagner le désert et apprendre à vivre dans le silence des pierres.
Cela vous fait une vie aride.
Cela fait de vous, un oiseau gris, comme un caillou, infiniment lancé et qui ne tombe pas.
Parfois, désespérer de ne pas être cet homme, préférant la beauté des grandes falaises de craie muettes au vert trompeur de l’oasis.
Apprendre du désert.
Apprendre le chant surgi de la soif insatiable.
Suivre cette caravane au loin, toujours réapparue, qui ne s’arrête pour personne et dont le but demeure inconnu.
Beauté fugitive, splendide éloignement.
Être cavalier de son existence,
Et que les chiens aboient.
Écouter le chant, la mélopée échappée de la gorge déchirée de celui qui a trop crié pour appeler l’amour.
L’amour nous est donné, comme la pluie tombe soudain dans le désert et fait pousser en une nuit une fleur insupportablement étrange et belle.
L’un arrache cette fleur pour la garder toute à lui.
Elle meurt, sa beauté saccagée.
L’amoureux prend un morceau de son coeur, du sang de sa poitrine et laisse le sable et le soleil mélanger son amour à la dune arrondie du monde.
Le poète s’agenouille et la contemple.
Dans son âme, son parfum s’évapore, perlent à ses yeux des larmes d’encre noire, une sombre rosée traçant les mots qui ne faneront plus.
Oui, un jour, tombent les bras comme tombent les fleurs.
Épuisées, les larmes.Dans vos mains, un pinceau, un archet.
De l’encre sur les doigts.
Au corps, une danse enroulée,
Un cri serré au coeur de la musique,
À la bouche, une prière.
L’arme de la patience dans le bleu du jour qui décroit.
La certitude de l’abandon où l’on vous laissera.
Trop peu de pluie dans le désert pour que poussent et prospèrent les vertes prairies de l’amour.
Une femme, comme trois petites gouttes de pluie tombées d’un merveilleux nuage,
Vite chassé par le vent indifférent de la destinée