HUMEUR NOIRE
Je vais sur une route de vacances. Une morte au gentil sourire m’indique le lieu du bivouac.
Ma vie ruisselle sur des murs délabrés.
Le corps cerné d’une haie de cyprès
J’écris mon nom.
Il y a l’aigle en plein ciel, des banquises qui craquent et puis des coeurs plaintifs qui saignent sous la glace.
Des hommes qui se prennent au jeu.
Le curieux silence de leur pas dans le sable.
Je marche tête en bas, invaincu sans combattre.
Je me livre bataille.
Petits cris, sottes blessures.
Dois-je rester muet?
J’ai le pied incertain, la fatigue fait trembler mes jambes.
La fatigue?
Je ne sais où aller.
J’aperçois partout la flèche imprécise de ma destination.
Les mots sont des pierres que renvoie la pierre en écho.
Je crie mon nom et la langue me tombe.
L’espoir?
Il tombe aussi.
Il pleut de l’espoir dans les eaux molles d’un mars fou.
Il pleut de l’encre.
Elle tâche des pages, des partitions, la toile des livres et des tableaux.
La terre est gorgée d’espoir.
Nous pataugeons.
Aucun dieu ne me décervelle.
Si je danse
Je cherche partout mon corps en morceaux.
Aucun dieu pour me tenir la main.
Rien qu’un homme et tout le tremblement.
Nulle grâce
Mais la soif insatiable du même verre vide.
Et la peur de vos yeux guettant l’inanité.
Honteux d’être là sur la même route que vous.
Horde lâchée vers ce même horizon où se profile une croix dans le flou.
Une morte aux dents longues m’indique les lieux de l’attente,
À l’écart de la route où la vie vient se précipiter.
Un dieu barbu m’écoute et puis se tait.
J’écris mon nom sur la pierre de son éternel silence.
Mon nom?
Personne.
Demain, sur la route de ma vie vacante,
J’écrirai un poème au pas cadencé.
Je ferai une danse de mon trébuchement.
Je chanterai très faux
Cela vous fera rire.
Ce soir, rien ne me va
Une grosse araignée a couru sur ma tempe
Et de son ventre mou s’écoule une humeur noire.